Bande de filles vu par Céline Sciamma, sa réalisatrice

Bande de filles vu par Céline Sciamma, sa réalisatrice

Whooz : Bandes de filles
ON : Au Cinéma le 22 octobre 2014

« Bande de filles » vu par

Céline Sciamma, sa réalisatrice

Filles d’aujourd’hui

 

Argument. Marieme vit ses 16 ans comme une succession d’interdits. La censure du quartier, la loi des garçons, l’impasse de l’école. Sa rencontre avec trois filles affranchies change tout. Elles dansent, elles se battent, elles parlent fort, elles rient de tout. Marieme devient Vic et entre dans la bande, pour vivre sa jeunesse.

L’avant-première de « Bande de filles », le dernier film de Céline Sciamma (« Naissance des pieuvres », « Tomboy ») eu lieu à l’UGC Ciné Cité de Lille* en présence de sa réalisatrice qui tint à aller à la rencontre de son public suite à la projection. Récit d’une conversation passionnée entre Céline Sciamma et ses premiers spectateurs : 


« Bande de filles », un film sur la banlieue

Céline Sciamma : Mes personnages vivent à la marge, « Bande de filles » traite de la banlieue mais n’est pas un film de banlieue, si l’on considère grossièrement qu’il y a des règles du genre depuis une vingtaine d’années en France autour de cette question avec des films comme « La Haine » ou « L’Esquive ». Le principe du destin romanesque est de vouloir le centre-ville, ici, c’est de rester en banlieue où il y a des enjeux souterrains : la domination masculine, un territoire puissant aux particularités graphiques. « Bande de Filles » est une fresque intime, une éducation sentimentale classique tournée en Scope, format idéal pour filmer le groupe et ces corps solidaires.


Le jeu naturel des actrices

Certaines scènes ont été improvisées notamment quelques scènes à enjeux précis. Il m’a fallu choisir les meilleures prises sachant que les premières prises ont une énergie naturelle ce qui n’est plus le cas des dernières prises, qui sont plus précises dans l’intention.

Les scènes improvisées sont entre autre : la scène de la chambre, la querelle au kébab ou la scène du mini-golf (la seule scène qui bénéficiera d’un trucage numérique). Cette dernière scène a été écrite, dirigée, dans le cadre d’une impro.


Inspiration

La quête d’identité. L’idée c’est de mettre des personnages féminins, des jeunes filles noires, au centre du film, sans théoriser ce qu’est être une fille mais de l’incarner. Je regarde des personnages à la marge, sans que ce soit exotique. Il faut que le spectateur vive l’altérité, on filme ici des trajets exceptionnels car ce sont des héroïnes. Je ne peux pas être plus sincère que ça.

J’ai écrit mon scénar seule, je ne voulais pas être dans le registre du fait divers. Je voulais un portrait de jeunes filles. Elles se retrouveront confrontées à leur époque. Si je devais citer quelques sources d’inspiration, alors je dirais Jane Austen, ou Jane Campion. J’ai cherché des actrices sans lien avec les personnages, en cherchant des qualités d’interprète j’ai cherché à ce qu’elles me disent : « je peux me reconnaitre dans le scénar ».


L’identité

C’est l’identité individuelle, sexuelle ou Nationale. Ce que j’avais en tête, c’est de parler de la France. Le racisme a été traité par la vendeuse … Ensuite « l’habit fait le moine » : j’ai un blouson noir alors j’ai des pouvoirs.

J’agite les questions dans une dynamique d’héroïsme et la dynamique est éprouvée à l’intérieur du film. Mes transitions au noirs durent 12 secondes, elles traduisent chaque changement de mes personnages, c’est une expérience de cinéma.

Mon film n’a pas de moralité, pas de phénomène de clôture, il faut que les spectateurs vivent avec les personnages. Que les spectateurs dialoguent avec le film, que les personnages rentrent dans leurs vies.


Le bleu du film

Il n’a pas de charge symbolique, c’est simplement une couleur qui me permet de faire basculer entre réalisme et onirisme, dans cette fameuse scène de Rihanna.


Céline Sciamma, une artiste engagée !

Je me suis rarement définie comme ça, je suis un auteur, oui. Bien sûr je suis une auteure engagée car je travaille sur le quotidien. J’assume être « politique », mais tout film est « politique », sans pour autant être forcément « engagé ». Etre politique c’est faire confiance au spectateur et à son intelligence.


La musique signée Para One

La musique est signée Para One car on a un dialogue de cinéma depuis longtemps. Je fréquente son studio et je sais ce qu’il fait, ici on s’était fixé la contrainte d’utiliser un thème de cinéma qui reviendrait plusieurs fois au cœur du film, tout en s’enrichissant (en durée et en arrangements) au gré de l’évolution des personnages …


« Diamonds », de Rihanna

J’écoutais la chanson lorsque j’écrivais le film, nous en avons acquis les droits, tout simplement ! Nous avons tourné la scène, sans les droits, tout compte fait ! La scène tournée nous avons contacté les producteurs de Rihanna, en envoyant la séquence filmée. Rihanna nous a donné son accord, sans nous offrir les droits !


Un casting noir

Je me positionne par rapport au cinéma Français, et ici la représentation des noirs. « Bande de filles » est un film de la diversité, et compte peu de blancs, hormis la vendeuse ou la responsable du lycée, dans un monde de noirs. C’est ici la question du regard du spectateur, c’est une expérience de cinéma.

Le casting proprement dit s’est fait d’une manière sauvage, ma directrice de casting a arpenté les rues de Paris à la recherche de caractères. L’origine de mon projet c’était les bandes de filles que je croisais aux Halles et autres endroits à Paris … Elles répondaient aux thèmes qui me sont chers, l’identité …


Les adolescents, sujet d’étude du cinéma de Céline Sciamma

« J’arrête ». Le cinéma ayant pour sujet l’adolescence, j’arrête ! Ca a à voir avec plein de chose : j’avais 26 ans à mon premier film, j’avais l’âge pour parler de l’adolescence et aborder le thème de la métamorphose. Je voulais faire mes gammes, parler de la jeunesse permet de rester libre, de s’inventer soi-même. Mes films m’ont permis de grandir en regardant mes personnages grandir.

Parler de l’adolescence, pour moi, c’est fini. J’ai aimé ça, c’est sûr.

Je n’ai pourtant pas de projets particuliers !


* Le 9 octobre 2014.


Pour aller plus loin sur WHOOZONE.COM


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23/10/2014
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