Le temps est assassin de Michel Bussi

Le temps est assassin de Michel Bussi

Whooz : Michel Bussi
ON : Le temps est assassin – Presse de la cité, 2016

Le temps est assassin de Michel Bussi

Chronique de Bruno D

Loin de sa Normandie qu'il affectionne tout particulièrement, Michel Bussi nous emmène cette fois en Corse avec « Le Temps est assassin » paru déjà en 2016. « Le Temps est assassin », un titre particulièrement bien choisi, qui colle parfaitement à l'esprit et à l'ambiance du roman.

Ceux qui ont déjà lu cet auteur le savent bien, Michel Bussi sait bâtir des intrigues particulièrement malicieuses. C'est également un formidable conteur quand il est inspiré comme dans « Nymphéas noirs » ou « Un avion sans elle ». Avec une histoire sur deux époques, 1989 et 2016, un décor somptueux, la Corse baignée de sa lumière estivale et des héros au destin tragique, torturés par la vie, « Le Temps est assassin » se situe dans cette même lignée.

Eté 1989, Clotilde Idrissi, 15 ans, est en vacances en Corse sur la presqu'île de Revellata près de Calvi, au camping des Euproctes, avec son frère aîné Nicolas, 18 ans, et ses parents. Sa vie est celle d'une adolescente rebelle, secrète qui consigne tout dans son journal intime. Le soir du 23 Août, en se rendant tous à un concert de chants corses, la Renault Fuego rouge conduite par son père quitte la route tortueuse de la corniche et plonge dans le vide. Rideau ! Trois morts : les parents, Nicolas, et, on ne sait par quel miracle, une rescapée : Clotilde. Cette dernière s'en tire avec « un poignet cassé, trois côtes fêlées, un genou vrillé...Rien » ! L'enquête conclut vite à un accident.

Eté 2016, soit 27 ans après, Clotilde est mariée à Franck, elle a une fille Valentine, ado de 15 ans, et elle revient pour la première fois sur l’île de Beauté... Cela restera-t-il un simple pèlerinage pour celle dont le nom de famille est Idrissi (sang Corse oblige) et qui appartient à une famille respectable, toute puissante en Corse, dont le grand père, Cassanu, fait office de patriarche et de gardien du temple, encore aujourd'hui malgré son âge vénérable?

« Le Temps est assassin » joue avec le charme de l'enfance et des vacances adolescentes, des premiers amours sous le soleil, de l'été qui désinhibe, et nous rappelle par-delà même notre jeunesse. La « Lambada » et autres tubes de Sabrina ont marqué de leur empreinte une génération de personnes dont je fais partie et ces remontées nostalgiques et les clins d'œil que vous trouverez tout au long de l'histoire contribuent à donner une belle épaisseur au récit.

Et puis, surtout il y a le talent de Michel Bussi. Nous faire découvrir une partie de l'histoire à travers le cahier intime de Clotilde est une belle idée. Essayer de nous expliquer la « corsitude » à demi-mots avec ses constructions qui explosent, les regards sous-entendus, les silences et les gens qui se taisent est presque......convenu. Sous un soleil rude et une végétation luxuriante, Michel Bussi instille le doute dans l'esprit du lecteur et rebat fort adroitement les cartes. Il nous sert une Corse bien mystérieuse où le mot « Honneur » n'est pas qu'une vue de l'esprit et il joue avec nos nerfs, nous promène par le bout du nez, et nous enfonce lentement, mais sûrement, dans une effroyable histoire. Bussi jongle constamment entre les deux époques et nous emprisonne sous sa plume avec la dextérité d'un virtuose jusqu'à la vérité ultime, qu'il nous livrera seulement au compte-goutte après des twists bien renversants.

Le rythme de ce dixième roman est plus lent que celui auquel Bussi nous a habitués dans ses précédents opus, me semble-t-il. Ce rythme c'est celui du temps corse écrasé par la chaleur de l'été, c'est le rythme des autochtones où rien ne se fait dans la précipitation, c'est le rythme et le temps du mystère, des secrets de la famille Idrissi, et des non-dits.

« Le Temps est assassin » est une superbe réussite qui m'a fait voyager dans l'écrin magnifique d’une des plus belles îles françaises, et transpirer abondamment en suivant les péripéties de tout son petit monde. Adapté et tourné pour la télévision depuis octobre 2018 dans la région de Calvi avec un très joli casting : Mathilde Seigner, Jenifer Bartoli, Thierry Godard, Grégory Fitoussi, et Fred Testot pour ne citer qu'eux, il ne nous reste plus qu'à espérer que l'adaptation soit le reflet fidèle de l'œuvre formidable que nous livre encore une fois Michel Bussi. Elle sera diffusée sur la première chaîne en 2019.

 

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10/01/2019
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