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La disparition de Joseph Mengele d'Olivier Guez

Whooz : Olivier Guez
ON : La disparition de Joseph Mengele – Grasset, 2017

La disparition de Joseph Mengele
d'Olivier Guez

« La disparition de Joseph Mengele » a été récompensé du prix Renaudot 2017

Chronique de Bruno D

Signe des temps, la littérature romanesque se penche sur le passé et éclaire celui-ci. Avec « La disparition de Joseph Mengele » (prix Renaudot 2017) Olivier Guez part à la recherche du docteur d'Auschwitz, le médecin à l'origine d'expériences inhumaines sur des sélections de déportés et qui, dès la fin de la guerre, a fuit l'Allemagne vaincue par les alliés vers l'Amérique du sud.

« La disparition de Joseph Mengele », biographie romancée, solidement documentée est tout simplement édifiante et passionnante. Parfois un peu complexe, contexte politique oblige, c'est avec une grande précision qu'Olivier Guez retrace la fuite et l'extradition de ce malade que fut le « fameux » Joseph Mengele. On découvre ainsi avec stupéfaction que bien des protections et des complicités sur les deux continents ont favorisé cette « disparition » et cette cavale de longue haleine. Pendant près de 35 ans une poignée de criminels de guerre ont ainsi échappé à la justice et ont continué à mener une vie normale, sans être inquiété d’aucune manière par la justice.

Connections, favoritisme, aveuglement du régime argentin, celui de Péron, fuite au Paraguay, puis au Brésil, la nouvelle existence de celui qui se fit appeler « Grégor » au début de sa fuite est relatée pas à pas par Olivier Guez. En pleine guerre froide, on comprend mieux les motivations argentines, qui pensaient bénéficier d'atouts pour combattre le communisme et une certaine forme de capitalisme, en accueillant ces chercheurs, ces élites nazies, autant atrophiées et fidèles de l'idéologie nazie.

Olivier Guez réussi le tour de force de plonger son lectorat dans la tête et le monde de Mengele. Ce dernier défendra et soutiendra toujours ses idées nauséabondes en mettant en avant ses recherches et sa volonté de purification sur ordre de guerre, le tout sans jamais exprimer le moindre remord.

« Pour sa génération, les inférieurs, les improductifs et les parasites étaient indignes de vivre. Hitler les guidait » (page 152). Soutenus par une industrie allemande (Shering, Zinck, Krupp, IG Farben, Bayer) tournant à plein régime, Mengele et ses sbires étaient les bras armés d'une bien triste Allemagne.

Le « médecin » d'Auschwitz sera mainte fois annoncé décédé : « c'est la septième fois que le criminel meurt, trépassé une fois sur le front russe, deux fois au Paraguay, une fois au Brésil, une autre en Bolivie, et même au Portugal où il se serait suicidé récemment ».

Telle une bête traquée ayant peur de son ombre, il n'échappera quand même pas à son destin. Paranoïaque et doublé d'un déni total, malgré ses protections et ses précautions, la vie après Auschwitz ne sera pour lui qu'une fuite en avant vers un délabrement profond. Jamais attrapé, donc jamais jugé, les services secrets israéliens, bien près de lui quelquefois furent vraiment les seuls à ne jamais lâcher la piste du Docteur.

« Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre. » Winston Churchill

« La disparition de Joseph Mengele » est un travail de mémoire salutaire.