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La Goulue Reine du Moulin Rouge de Maryline Martin

Whooz : Maryline Martin
ON : La Goulue, Reine du Moulin Rouge – éditions du Rocher, 2019

Une femme libre

La Goulue, Reine du Moulin Rouge de Maryline Martin

« De Reine à ruine, la différence n'est que d'une seule voyelle ». Maryline Martin à propos de son livre « La Goulue, Reine du Moulin Rouge »*

Chronique de François C

Louise Weber, dite « La Goulue », fut non seulement la Reine du Moulin Rouge et plus généralement la Reine des nuits parisiennes avant de tomber en disgrâce et de disparaître dans des conditions misérables, elle qui provenait d'un milieu modeste. « La Goulue, Reine du Moulin Rouge » de Maryline Martin donne à découvrir une personnalité qui fut toujours attirée par la liberté, une personnalité bien loin de son image communément admise de vicieuse dénuée d'intelligence.

Certes La Goulue, femme du « Goulu » (plus précisément, femme de Gaston Goulu-Chilipane, son premier protecteur) est « gouailleuse » et « grande gueule ». Plutôt gironde, elle aime boire (y compris dans le verre des autres), manger (y compris dans l'assiette des autres) et s'amuser. A l'image de la Troisième République ! A l'image de la « Belle époque ». Mais instinctive, elle correspondait et répondait à l'esprit de Montmartre, le milieu dans lequel elle avait choisi d'évoluer, et, avant tout le monde, avait compris et maîtrisa les vertus du « Buzz » (notamment médiatique) et de la création d'une image publique.

* La Goulue, Reine du Moulin Rouge - Maryline Martin - Editions du Rocher

La « Magnifique Poissarde ». Louise Weber naît dans un milieu modeste, blanchisseuse, jeune, son moyen d'émancipation elle le trouve dans la danse, et plus particulièrement dans l'art du « chahut » (danse qui, magnifiée par La Goulue, deviendra « Le Cancan »). Affective, si elle ne fit pas toujours de bons choix parmi ses amants, la danseuse fit de belles rencontres notamment avec Valentin le Désossé ou encore Toulouse Lautrec. En quelques six années en tête d'affiche du Moulin Rouge, La Goulue s'imposa dans le milieu mondain et côtoya les plus grandes personnalités de son époque. Sa déchéance commença dès qu'elle quitta l'institution qui la vît naître. Elle avait 29 ans. Pensant que sous son seul nom elle attirerait son public à la foire du trône, elle y acheta une baraque et y monta un spectacle de danse orientale, sans réel succès, avant, plus tard, de devenir dompteuse d'une ménagerie foraine dans des prestations jugées pathétiques. Elle passa les dernières années de sa vie à vivre misérablement en vendeuse de lacets ou de cigarettes aux portes des lieux de sa gloire passée. Elle fut enterrée au cimetière de Pantin en 1929. 1929, année dont le krach marqua la fin des années folles et de la Belle Epoque.

Réhabilitation. L'année 1992 vit l'aboutissement des démarches entreprises par Monsieur Michel Souvais (arrière-petit-fils de La Goulue) pour faire transférer son aïeule au cimetière de Montparnasse. Son transfert eut lieu lors d'une cérémonie qui rendit hommage à cette figure de la vie parisienne (et française) que fut La Goulue.

« La Goulue, Reine du Moulin Rouge » est le fruit d'une longue enquête menée par Maryline Martin sur la figure emblématique de la Butte Montmartre à partir d'une large documentation notamment constituée par le journal intime de La Goulue, des archives de la Société du Vieux Montmartre ainsi que celles du service de la mémoire et des affaires culturelles de la préfecture de Police recoupée par de nombreux documents d'époque. Documents cités ou référencés dans l'ouvrage. La romancière ne s'est accordée qu'une fantaisie fictionnelle complète en se permettant d'écrire les mots qu'auraient pu poser Jean Mazère, ami auteur de la Goulue, à son propos, notamment son enterrement au cimetière de Pantin. Maryline Martin évoque ainsi les figures de Jean Mazère et de Pierre Lazareff, tous deux journalistes, qui furent les « petits biographes » (comme La Goulue aimait à les appeler) de l'illustre montmartoise.

« La Goulue » est non seulement le portrait d’une femme libre, mais également le portrait d'une époque et des femmes dans cette époque. Des éléments qui rentrent en résonnance avec notre époque actuelle. Comment ne pas penser à la figure et au parcours de Loana, première star de la télé-réalité, à la lecture du livre de Maryline Martin ? D'autres « Goulue » modernes existent, qu'elles soient « Youtubeuses », chanteuses à succès ou stars de la télé-réalité, la presse people en raffole déjà. Pourvu que leurs destins les amène à côtoyer les étoiles et qu'elles soient accidentées par la vie pour constituer des histoires que l'on jugera singulières.

« La Goulue, Reine du Moulin Rouge » est une biographie de référence qui réhabilite et qui rend hommage à une figure attachante, une personnalité humaine, libre et intègre loin de celle communément admise jusqu'alors et dont 2019 marque les 90 ans de la disparition. Le Moulin Rouge quant à lui fêtant, en 2019, son 130ème anniversaire !

Souhaits de lecteur. Maryline Martin aime à s'interroger sur la place et le rôle des femmes dans l'histoire. Par une fiction ou par une biographie, pourrait-elle s'attacher aux parcours de Mademoiselle Beuze (dite « Grille d'Égout ») ou de Jane Avril ? Mieux encore, la romancière pourrait-elle s'attacher à une biographie de Sarah Bernhard ou de … Christine Devier-Jonqcourt ? Et s'il ne devait y avoir qu'une figure masculine à laquelle la journaliste littéraire pourrait s'intéresser, alors ce serait à la figure de Valentin le Désossé.