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Une ritournelle ne fait pas le printemps de Philippe Georget

Whooz : Philippe Georget
ON : Une ritournelle ne fait pas le printemps – Jigal Polar, 2020

Une ritournelle ne fait pas
le printemps de Philippe Georget

Chronique de Bruno Delaroque

Je gardais un excellent souvenir de « Méfaits d'hiver » (Jigal Polar 2016). J'avais découvert un auteur remarquable avec un « touché d'écriture », je ne sais pas si on peut dire cela, et une façon de raconter des « faits divers », de les mettre en scène comme je n'en avais jamais vu.

Avec « Une ritournelle ne fait pas le printemps», j'ai retrouvé cette patte et ce plaisir de lecture du début à la fin. Gilles Sebag, flic à Perpignan, héros récurrent des précédents romans de Philippe Georget reprend du service et c'est très bien construit.

Plongée au cœur de la culture catalane avec cette procession de La Sanch du vendredi saint qui se déroule depuis près de cinq siècles. Des pénitents en caparutxa, longue robe de bure et cagoule conique défilent dans le centre-ville. Des pétards claquent, assimilés à des coups de feu, foule paniquée, l'un des pénitents ne se relève pas, frappé d'un coup de couteau assassin et bien porté. Pendant ce temps une bijouterie se fait braquer.

Un début en fanfare et deux enquêtes difficiles avec en prime une fine exploration de la société catalane, de ses coutumes, des ruelles du quartier gitan aux venelles cachées, et toujours l'ombre poétique et équivoque d'un Charles Trenet planant sur la ville.

Finesse et subtilité sont deux des piliers de ce roman. On assiste à une vraie enquête à l'ancienne où on ne néglige aucun point. Gille Sebag et ses confrères ont de l'expérience et ces petits riens mis bout à bout pourraient bien arriver tout simplement à résoudre l'affaire. Le rythme est parfois lent, mais adapté à la nébulosité des faits, au climat et au décor que nous plante l'auteur. Ici on prend le temps de ne négliger aucun détail et on prend aussi le temps de vivre, de manger et de se sourire.

Personne n'est jugé d'avance, que ce soient les jeunes des rues ou les SDF, ils font partie de la vie de la cité et quelquefois on découvre des choses surprenantes derrière ces fantômes de la rue, ces visages. Beaucoup d'humanité et de tendresse pour l'auteur à travers le regard de Gilles Sebag, amoureux du petit noir et des phrases qui font mouche. Les personnages secondaires sont savoureux et jusque dans les détails à travers les descriptions ou les constatations on a mine de rien une sacrée satyre de la bonne société.

Trouver la vérité parmi les rumeurs et les suppositions va vite s'avérer être un sacré challenge. Bien évidemment, le lieutenant Sebag arrivera à faire sortir le loup du bois et à boucler cette affaire, mais c'est au prix de bien des détours, des mystères et des surprises.

J'ai adoré celle promenade entre Perpignan et Barcelone, la poésie du fou chantant toujours présent, l'atmosphère toute sudiste qui baigne ce récit d'une douceur bienfaisante, la personnalité attachante des enquêteurs, les références à la difficulté des librairies, l'éclairage sur cette procession emblématique de La Sanch, et puis surtout, surtout, comme je le disais en préambule, un superbe « toucher d'écriture ». Philippe Georget mérite aussi mon coup de cœur pour ces 264 pages menées de façon formidable......et c'est encore un Jigal Polar !