Nos Ames au diable de Jérôme Camut et Nathalie Hug - Best of 2022

Whooz : Jérôme Camut et Nathalie Hug
ON : Nos Ames au diable – Fleuve Noir, 2022

Nos Ames au diable
Jérôme Camut et Nathalie Hug

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Le meilleur de 2022 pour mieux commencer 2023 ... Bruno Delaroque vous propose son palmarès de sérial lecteur …

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Nos Ames au diable vu par Fleuve Noir

Il vaut parfois mieux ignorer la vérité...

Mi-juillet, Sixtine, dix ans, disparaît sur une plage de l'île d'Oléron. Pour Jeanne, sa mère, c'est tout son monde qui s'écroule. Elle s'en veut d'avoir été trop accaparée par son métier. Elle en veut à son mari, qui aurait dû surveiller leur petite brune aux yeux bleus, mais qui a failli, trop occupé à donner un énième coup de canif dans leur contrat de mariage.

Lorsque les recherches conduisent finalement à un multirécidiviste connu par la justice pour le viol de quatre fillettes, Jeanne comprend que rien ne sera jamais plus comme avant. Et son travail de résilience s'annonce d'autant plus long que le corps de Sixtine n'a jamais été retrouvé.

Une absence qui laisse planer comme une incertitude... Et si la vérité s'avérait plus sordide et glaciale encore que la mort d'un enfant ?

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Chronique de Bruno Delaroque

La sortie d'un nouvel opus des Camhug (Jérôme Camut et Nathalie Hug) est toujours un événement pour le lecteur que je suis. D'abord parce qu'une écriture à quatre mains, ce n'est pas courant et ensuite parce que ces deux-là m’ont fait maintes fois frissonner avec plusieurs de leurs œuvres. Avec « Nos Ames au diable » sorti mi-mars, je crois bien que ces deux « diaboliques » ont décidé de remettre le couvert.

Sixtine, jeune fille de dix ans, espiègle et un peu aventureuse disparaît brutalement. Nous sommes sur l'île d'Oléron, Charente Maritime, en plein été.

Angoisse d'une mère travaillant dans la création publicitaire à Paris, angoisse d'une fillette de dix ans, angoisse d'un père qui absorbe les reproches. C'est un début où les âmes sont mises à rude épreuve entre nerfs qui lâchent, crispations, douleurs et frayeurs, pour Jeanne et Richard les parents.

Peur qui empire pour les parents et calvaire de la petite Sixtine, les Camhug sont de retour pour le meilleur et surtout...le pire.

Écriture incisive, sens du détail, effroi ; l’existence s'écroule et des failles apparaissent au grand jour. Différence de rang et de classe sociale, belle famille, l’horreur dans l'horreur, l'erreur de casting au sein d'un destin qui explose.

Douleur d'une mère qui culpabilise à mort et perd ses repères, se pose des questions...pas facile ce genre d'épreuve ! Qui peut savoir comment on réagirait ? Espoir et désespoir, justice, mais quelle justice où les condamnés ont plus de droit que les victimes ; ce roman est très noir et humain à la fois. La plume des Camhug rend l'histoire addictive et sombre, autant que courageuse pour celles qui s'accrochent, comme Sixtine qui lutte, ou Jeanne qui espère.

Un clin d'œil pour respirer, rendre l'histoire un peu plus légère, on retrouve deux vieilles connaissances de nos auteurs déjà présents dans la monstrueuse Trilogie W3 ….et même Mouchou. C'est juste du plaisir et une excellente idée.

« Il y a des plaies qui ne se referment pas » ; j’ajouterais « jamais » ; redondance de votre chroniqueur, mais le temps passe, et chacun vit avec ses doutes, sa détresse. Ne pas savoir n'est-il pas la pire des choses ?

Comme un miroir qui ne renvoie plus aucun reflet, Sixtine s'est volatilisée un jour. Sa mère Jeanne s’est liquéfiée. Elle survit mois après mois, année après année, pour quoi, pour qui ? Sixtine n'est plus, Jeanne presque plus, entre oubli, souvenirs et estomac noué.

Six ans, c'est le moment que choisissent les Camhug pour balancer un twist supersonique. Je me disais bien aussi que....... !

Ce bouquin est une ode à la vie et au malheur, une ode à l'évolution et aux épreuves, celles que l'on ne comprend pas, que l'on est incapable d'imaginer lorsque tout va bien. Exit les considérations écologiques et climatiques des deux précédents romans, les Camhug reviennent à du plus classique, moins engagé, mais assurément du plus glauque, du plus brutal, bref ce qu'ils savent faire parfaitement.

Chaque partie de cet opus est une énigme, une quête, une perpétuelle interrogation. Des portes s'ouvrent, se ferment, les cerveaux moulinent entre illusions et fuite en avant. La psychologie des personnages est poignante, la réalisation précise.

Je vous parlais plus haut de ce couple d'écrivains revenus à leurs fondamentaux, mais j'étais loin de me douter de ce qui allait suivre. Ce sont deux « malades ».....mais que j'adore. Inventer ce genre d'histoire ne s'invente pas !

Incroyable, innommable et abject par moment, ces trois adjectifs qui pourraient caractériser cette lecture me semblent finalement faibles. Comment dirais-je ? Ce livre est un concentré de l'univers des Camhug et de ce qu'ils ont écrit en plus troublant peut-être, mais plus juste aussi.

Il va en déranger plus d'un, en choquera plus d'une, mais tant que la dernière page ne sera pas tournée, on sait qu'avec ces deux-là….on ne sait rien.

Les chapitres courts, très courts, une page, une demi-page ou même moins donnent toute sa puissance au récit. Comme un marteau qui tape sur une enclume, le décompte voulu par les auteurs maîtres du tempo, frappe de plein fouet les lecteurs que nous sommes. C'est une mécanique machiavélique, un long cheminement de tourments et c'est d'une redoutable efficacité, implacable même ! On parle de justice, de traumatismes, de vies gâchées, de folie aussi, mais la vérité, Elle ; elle se situe où ?

Ce roman est une réussite totale avec des protagonistes parfaitement rendus, un scénario surprenant avec beaucoup d'interrogation sur notre « drôle » de monde où la violence explose dès le plus jeune âge. On dit qu'il n'y a rien de pire que de perdre un enfant. Nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais après avoir lu « Nos âmes au diable », et je suis sûr que vous le lirez ; vous ne serez peut-être plus aussi affirmatif. Ce titre va éveiller une foule de sentiments et vous ne sortirez pas indemnes de cette lecture parce que Jérôme Camut et Nathalie Hug y ont particulièrement veillés.

BRAVO, quel retour en force, ENOOOOOOOOOOORME coup de cœur pour Whoozone.com !



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