A+A A-

Criminal Loft d'Armelle Carbonel

Whooz : Armelle Carbonel
ON : Criminal Loft, Fleur Sauvage - 2015

Monsters Games

« Criminal Loft » d’Armelle Carbonel est un livre enthousiasmant remarqué par l’œil expert de Gérard Collard. Il est facile de comprendre pourquoi il représente un tel phénomène de librairie tant il conjugue subtilité et originalité.

Regard sur « Criminal Loft », un livre événement

Et si tout était dit avec les mots de la quatrième de couverture de « Criminal Loft », le livre d’Armelle Carbonel : Sanatorium de Waverly Hills. Six hommes et deux femmes, reconnus coupables par la justice américaine et enfermés dans le couloir de la mort. Huit candidats sélectionnés pour participer au reality show le plus brûlant qui ait jamais existé. Chacun d’eux devra vous convaincre qu’il mérite de vivre.

Page turner. Dès le début du livre le lecteur est happé par une histoire de sociopathes obligés de cohabiter ensemble pour les besoins d’un jeu télé : Criminal Loft. « Criminal Loft » ou le « Secret Story » des psychopathes sélectionnés dans le couloir de la mort. La partie « Secret » étant constituée par leur(s) crime(s) (qu’ils doivent taire). La liberté n’est ni plus ni moins que le lot à gagner pour les participants à ce jeu de télé-réalité. Au téléspectateur tout puissant de renvoyer à la mort les candidats « nominés » chaque semaine. « Criminal Loft », un jeu pervers, qui nous l’espérons a été déposé par Armelle Carbonel car tôt ou tard la télévision en mal de sensations fortes et de voyeurisme abordera le sujet. Le sujet est d’ailleurs frôlé avec « 60 Days In » (« 60 jours en prison »), une série de la chaîne A&E ou sept candidats volontaires sont plongés dans une prison ultra violente.

Des personnages. Au fil des pages Armelle Carbonel donne vie à chacun des huit candidats que « Criminal Loft » suit à travers le regard de John T, psychopathe/candidat. C’est par ses mots que « Criminal Loft » existe. Le casting, composé de caractères distincts, est à l’avenant d’une émission de télé-réalité bien rôdée. Face aux psychopathes, deux matons (« Laurel et Hardy ») et « L’Ombre » (« La Voix » en quelque sorte) sont les autres personnages développés par Armelle Carbonel. Enfin, Wavery Hills, sanatorium, lieu de l’action de « Criminal Loft », un lieu que l’on dit hanté, un lieu à l’âme préexistante, est également un personnage à part entière du livre de la jeune écrivaine.

Subtil. Armelle Carbonel prend plaisir à contrarier les attentes de ses lecteurs – pour le plus grand plaisir de ceux-ci – indéniablement. Qu’attendre du jeu télé ? Que les candidats s’entretuent comme dans « Battle Royale » ? Non. L’action sera plus nuancée, focalisée sur l’humain. On constatera la mise en place d’influences réciproques dès le début du jeu. Les plus forts n’étant pas forcément ceux que l’on croit. Les manipulateurs (ce qu’ils sont déjà tous à l’origine) seront manipulés. Armelle Carbonel jouera ainsi avec la mort et le fantastique sans que son livre ne sombre dans l’inexplicable.

« Criminal Loft » le jeu et le livre de tous les possibles. Une question se pose au lecteur dès les premières pages : « Criminal Loft » existe par le témoignage à la première personne de John T, candidat d’un jeu de télé réalité à élimination. Qu’arriverait-il si John T était éliminé (voir s’il mourait) ? John T gagnera t’il le jeu ? « Criminal Loft » est le livre de tous les possibles. John T éliminé, il pourrait alors devenir simple téléspectateur du jeu auquel il avait participé et continuer son récit. La mécanique du jeu, des réactions humaine, et des lieux, tous contribue à ces possibles – avec une prédominance pour le sanatorium et ses fantômes. L’ombre de Stephen King plane sur le lieu de l’action du jeu avec ses pièces interdites, avec son « tunnel de la mort », et une certaine « chambre 502 ». Le sanatorium est un personnage à part entière du roman d’Armelle Carbonel.

Le récit. Il est comparable à une mécanique de précision. Les chapitres de « Criminal Loft » trouvent souvent leurs conclusions par un cliffanger bienvenu. « Criminal Loft » est une construction rigoureuse jouant sur le motif du rituel imposé par le jeu de télé réalité et le récit qu’il mène. Flash-backs ou apartés renforcent le déroulé de l’histoire. Une histoire au cœur de la mécanique d’un jeu truqué dont « L’Ombre » est le véritable manipulateur.