Et puis mourir de Jean-Luc Bizien

Et puis mourir de Jean-Luc Bizien

Whooz : Jean-Luc Bizien
ON : Et puis mourir – Fayard Noir, 2021

Et puis mourir
de Jean-Luc Bizien


Chronique de Bruno Delaroque

C'est un début de roman assez nostalgique pour cet avant dernier roman de Jean-Luc Bizien (Son nouveau « Le Botaniste » est disponible chez Fayard Noir depuis le 16 Mars 2022).

Bastion contre 36 Quai des Orfèvres, des regrets et des constatations amères pour les flics qui restent les mêmes malgré tout en passant d'un bâtiment à l'autre.

Du haut du balcon de son superbe appartement sécurisé, Alexandre Lemaître, un nanti pour qui l'argent n'est pas un problème, assiste à l'affrontement « Gilets Jaunes Forces de l'ordre ». Nous sommes à Paris le 1er décembre 2018. Entre autosatisfaction de voir ces gueux écrasés, il pense être au-dessus de tout cela, intouchable, il domine le monde et l'existence comme il domine la rue et le peuple du haut de son 6ème étage. Il se réjouit d’un modèle de Porsche assez ancien détruit par la vindicte populaire et les flammes, symbole à ses yeux d'un faux riche voulant sa part de gâteau.

On trouve ici la fracture bien profonde entre les gens du haut et ceux du bas, toute une symbolique exploitée par l’auteur dans ce début agité. Lemaître ne sait pas encore que sa dernière heure est arrivée, qu’elle sera violente, bien plus que les maux qu’il vient de regarder du haut de son perchoir en se délectant.

Dans un Paris apocalyptique où les gaz lacrymogènes se répandent et répondent aux cocktails Molotov, un assassin rode et se glisse au cœur des immeubles huppés pour accomplir sa mission.

Eclairage d’une époque précise et allusions à certains faits, ce roman fortement ancré dans la réalité est une belle réflexion. On part le matin, jeune et belle du haut de ses 19 printemps manifester pour une juste cause et on peut vite se retrouver en enfer. Sandra en a fait l’expérience et elle ne sera pas la seule. Lire cet opus dix-huit mois après sa sortie permet de replonger dans cette espèce de Jacquerie moderne qui a inquiété et presque fait vaciller le Pouvoir. Il n’en reste pas moins que pendant que des conseillers politiques sont prêts à tout pour discréditer le mouvement, le tueur, lui, agit !

Lorsque le commandant Le Guen en charge de l’enquête se laisse aller à quelques confidences ; Stratocaster Fender et The Stranglers, un verre de Saint Emilion à la main, on est sûr que c’est bien Jean-Luc Bizien qui est à la manœuvre.

Un livre universel qui parle du bien et du mal, de la vie qui passe aussi, un regard dans le rétro comme une catharsis ; « Et puis mourir » dont le but premier est de divertir, se révèle bien plus profond qu’il n’y parait selon l’endroit où l’on place le curseur de lecture.

On aborde la saloperie de maladie d’Alzheimer avec ces cerveaux qui se mettent à vriller avant que l’oubli et la nuit sombre ne les envahissent à jamais. Entre tristesse, désolation, désespoir et folie, ça pourrait être moi, vous, votre père ou votre mère et personne n’est à l’abri.

Mais quelquefois le cerveau abrite des choses bien noires, des souvenirs enfouis que l’on souhaiterait oublier à tout jamais.

Justice à appliquer ; mais quand les faits sont prescrits, qu’est-ce que la justice pour une vie détruite ? Jeunesse dorée qui vit et abuse, prend s’en se soucier ; on est finalement toujours dans une lutte de classe où certains se servent pendant que d’autres galèrent un peu plus chaque jour et finissent par mourir.

Devenue adultes, cette jeunesse bien sous tous rapports, occupant de jolis postes et une respectabilité que confère le Dieu Argent, continue à se servir en asservissant les hommes pour toujours plus de profit et de domination.

Ce roman très « Gilets Jaunes » porte un regard acerbe sur notre belle société. Notre duo aux commandes de l’enquête, Le Guen et Agostini le corse, ne sont ni plus ni moins que des éboueurs chargés de collecter les ordures et finalement se prennent la misère du monde en pleine tronche. Ils ont un sacré boulot !

« Et puis mourir » est un titre qui fait mouche, et une histoire qui peut se décoder sur plusieurs niveaux. C’est surtout très bien réalisé. Bravo Monsieur Jean-Luc Bizien !



Jean-Luc Bizien sur WHOOZONE.COM

L'évangile des ténébres par Eppy Fanny

Et puis mourir par Bruno Delaroque


Pour aller plus loin


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14/04/2022
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