La peur bleue de Maurice Gouiran

La peur bleue de Maurice Gouiran

Whooz : Maurice Gouiran
ON : La peur bleue – JigalPolar, 2021

Passé brûlant

La peur bleue de Maurice Gouiran

Chronique de Bruno Delaroque

Connaissez vous Maurice Gouiran ? Si la réponse est non, je vous invite à découvrir sans plus tarder ce formidable écrivain et ce, pour au moins deux raisons.

La première, c'est qu'avec plus de 30 livres au compteur, ce romancier sudiste a toujours quelque chose à raconter, une injustice à signaler, un point d'histoire à éclairer, et il le fait fort bien.

La deuxième, c'est que le bonhomme est du genre fidèle avec ses publications régulières depuis une vingtaine d'années chez Jigal, mais sa grande particularité est d'être un auteur original et engagé. Son riche parcours et ses expériences dans divers domaines font de lui un acteur incontournable de la littérature noire et policière française. Il faut absolument le lire !

« La peur bleue » commence avec le meurtre d'un vieux Harki que l'on retrouve massacré et pendu à une branche d'olivier. C'est l'occasion pour l'auteur d'aborder le problème de ces gens déracinés, étrangers chez eux comme en France, habitants de nul part et au passé riche de douleurs et de frustrations. Hommage et devoir de mémoire, Maurice Gouiran en profite pour faire ressurgir les vieux démons avec les non-dits de la guerre d'Algérie.

Avec un œil amusé, mais surtout affûté, il aborde aussi l'épineux problème des immeubles vétustes, non entretenus qui s'effondrent dans le centre de Marseille, causant de nombreuses victimes et un énorme émoi dans la population. Avec une municipalité indolente et des élus pas forcément clairs, plus concernés qu'il n'y paraît, Maurice Gouiran s'indigne une fois de plus !

De l'histoire plus ancienne donc, et de l'histoire récente donnent à notre auteur la matière pour écrire à nouveau un superbe roman ; et il faut bien le dire, que nous autres lecteurs, sommes très heureux de retrouver Clovis Narigou, berger et reporter débrouillard ainsi qu'Emma Govgaline, la fliquette, ses héros fétiches.

En finalité, même combat, même cause pour les mal aimés d'hier, et les pauvres d'aujourd'hui, que l'on veut bien exploiter, mais qui sont désignés coupables et indésirables sur le territoire français. Ces gens issus de l'immigration, qu'on serait bien content de glisser sous le tapis comme de la poussière, histoire de ne plus les voir, parce qu'ils sont quantité négligeable. Abject !

Le premier mort se révèle être le père d'un flic qui avait rompu tout lien avec son père depuis très longtemps et cette double enquête va forcément « emmerder » le commissaire Arnal qui est du genre, moins de vagues, mieux je me porterai à quelques encablures de la retraite. Pensez donc, le père d'un flic que l'on retrouve pendu, et une enquête opaque dans les milieux politico-immobiliers marseillais. Ouh là, ça va pas le faire et ça lui promet de beaux ulcères !

Comme d'habitude avec Maurice Gouiran, la promenade est belle au cœur des paysages et plaines languedociennes, où les noms évoqués comme Tavel, Corbières ou Coteaux du Languedoc sonnent comme un appel aux divins breuvages que tout épicurien se doit de posséder en cave et viennent concurrencer le petit « jaunet ».

Dans ce bouquin où « l'on donne des militaires et des flics plutôt que des infirmières ou des médecins au peuple », Clovis Narigou, appelé à la rescousse par son ami Emma, va se retrouver en première ligne pour élucider ces affaires.

« La peur bleue » est un superbe roman ou l'auteur pointe du doigt « la bleuite » et vient un tant soit peu essayer de bousculer nos consciences et notre vision de la Guerre d'Algérie avec un regard juste et quelques lumières sur la vie et l'histoire des Harkis. J'ai des amis proches qui ont fait cette guerre, et me l'ont maintes fois racontée, mais l'éclairage historique de Maurice Gouiran m'a apprit beaucoup de choses.

Ajoutez y un peu de politique urbaine marseillaise et vous comprendrez pourquoi Maurice Gouiran est un auteur incontournable, grand observateur de la société d'hier et d'aujourd'hui. Tout cela nous donne un récit passionnant et un nouveau coup de cœur whoozonien pour Maurice Gouiran et son éditeur Jigal Polar.

Maurice Gouiran sur WHOOZONE.COM (chroniques de Bruno Delaroque)

Le Diable n'est pas mort à Dachau

Qaraqosh

La peur bleue

Et dire qu'il y a encore des cons qui croient que la terre est ronde

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Maurice Gouiran lors de l'édition 2020 du Salon de Templemars


Pour aller plus loin


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08/07/2021
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