Mato Grosso d'Ian Manook

Mato Grosso d'Ian Manook

Whooz : Ian Manook
ON : Mato Grosso – Albin Michel, 2017 – Livre de Poche, 2018

Mato Grosso d'Ian Manook

Coup de coeur de l'année 2020

Mato Grosso vu par Le Livre de Poche

Mato Grosso. Une odeur sauvage de terre trop riche et d'humus brun. La beauté vénéneuse de la jungle dans laquelle on s'enfonce jusqu'à s'y noyer. La violence du ciel et la moiteur des nuits. L'amour qui rend fou et la mort... incontournable.

Est-ce pour faire la paix avec lui-même que Haret, écrivain bourlingueur, est revenu après un exil de trente ans ? Est-ce parce qu'il a le sentiment que c'est la dernière fois ?

Ian Manook nous entraîne dans un Brésil luxuriant jusqu'à l'étouffement, peuplé d'aventuriers, de trafiquants et de flics corrompus avec ce roman qui ensorcelle et prend à la gorge.

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Chronique d'Eppy Fanny

Un salon du livre dans le cadre magnifique de la ville d’Auvers S/Oise (« Auvers noir », pour ne pas le citer*), des moments très privilégiés avec les auteurs présents, dont Ian Manook accompagné de Francoise. Et me voilà riche de ce roman. Un ouvrage qui a une grande importance pour Ian. L’intrigue se déroule dans ce Brésil qu’il connaît et affectionne. Nous sommes ici bien loin de la steppe et de « Yeruldelgger ». Un autre dépaysement. Total. Merci.

Mais cette histoire nous enveloppe aussi sûrement que la moiteur de la nature luxuriante du Brésil. Elle nous enserre quasi jusqu’à l’étouffement et nous conduit à un dénouement implacable : celui d’une vengeance.

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L’histoire :

Avril 2006 -

Jacques Haret est de retour sur le sol du Brésil. 30 ans qu’il en était parti. Il est accueilli à l’aéroport par Martinho et conduit à Petrópolis, petite Bavière sous les tropiques. Lotte, la femme de Stefan Zweig, définissait l’endroit comme « une petite jungle au creux des Alpes », quelques jours avant que le couple ne s’y donne la mort.

C’est le père de son chauffeur qui va héberger Jacques, dans la maison même où Stefan et Lotte se sont donné la mort. Quel choc pour l’écrivain. Dormir dans ce lieu tant chargé d’histoire et de symbole.

Extrait page 17 : « - Imaginez-vous, Martinho, qu’il y a 30 ans j’ai connu un homme qui affirmait avoir vécu son enfance dans cette même maison. Vous vous rendez-compte ? ».

Et le choc va être grand.

Car une voix, comme un écho du passé vient répondre « Je ne savais pas que nous avions été amis… »

30 ans sont gommés, et le passé ressurgi sous les traits d’António Figueiras, l’ancien policier. Vieilli, amaigri, en fauteuil. Reconverti dans l’édition, c’est à ce titre qu’il accueille Jacques pour son « Roman Brésilien ». Un roman écrit comme une confession. Un défi ? Un récit sans scrupules, sans états d’âme pour les survivants qui ne peuvent que se reconnaître, même si les noms ont été changés. Le passé est là. Déroulé, enjolivé. Tellement de mensonges auxquels Haret a fini par croire. Il est tellement plus flatteur de ne pas avoir le mauvais rôle.

L’auteur est prisonnier de Santana/Figueiras qui le menace d’une arme. Le fantôme d’une femme lumineuse, Angèle/Blanche, une femme que l’un a follement aimé, l’autre follement convoité en disant qu’il s’agissait d’amour, est là, dressé entre eux. Car les mots peuvent tuer. Et ceux de l’écrivain ont tué Blanche.

Jacques Haret, phonétiquement le jacaré (le caïman), va devoir affronter le passé et la vérité, dont la mort d’Evéraldo, qui l’a conduit à quitter le Brésil il y a 30 ans. Evéraldo, le père de l’enfant que portait Blanche. Cet enfant, c’est Martinho, à qui Figueiras a servi de père. Une histoire dans laquelle Figueiras n’est pas non plus un ange, pas plus que ces puissants pour qui la vie n’a pas grande importance.

1976 -

Extrait du roman d’Haret page 47 : « Je suis devenu fou de ce pays. De cette nature tirant sa beauté vénéneuse des pourritures qui s’y décomposent. De cette beauté dangereuse où glissent des cascavel mortels, grabouillent des mygales industrieuses, et se tapissent des jacarés aux aguets. Cette folie m’a gagné. Elle est en moi à présent, là où mes sentiments pourrissent et se délitent eux aussi pour former l’humus de cette déraison qui m’enivre de l’intérieur. »

Un face à face inexorable va se dérouler, où le roman d’Haret avec sa vérité, et la Vérité, vont se chevaucher et s’entremêler. Ce sera une explosion d’amour, de convoitise, et de mort, le tout dans la violence et la moiteur de ce pays fascinant.

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L'avis d'Eppy

Le Brésil est le personnage central de ce roman. On rêve de déguster du pacu grillé relevé d’un juste molho d’oignons et de poivrons sur un riz blanc peu sucré, arrosé d’une bière bien fraîche. De savourer du fromage salé à la pâte de goyave. De se rincer la bouche d’un verre d’eau pour apprécier comme il se doit le café brésilien, ce concentré de nectar. Puis d’écouter les légendes indiennes le soir au bivouac. Perdu au milieu de cette nature, sauvage, autant que ses hôtes. Craindre la onça (panthère), capable de s’attaquer à un jacaré adulte, qui rode.

Ce plongeon au cœur brûlant du Brésil, que nous offre Ian, est un voyage inoubliable.

Les déviances et les travers de la nature humaine y sont merveilleusement dépeints.

J’ai pour ma part adoré ce récit, une ode au Brésil cher à l’auteur, et une histoire dense et prenante dont on ne sort pas indemne.

Du très grand Manook. A lire absolument.



Roy Braverman sur WHOOZONE.COM

Hunter vu par Bruno Delaroque

Freeman vu par Bruno Delaroque


Ian Manook sur WHOOZONE.COM

Yeruldegger vu par Bruno Delaroque

Mato Grosso vu par Eppy Fanny

Heimaey vu par Bruno Delaroque

Rencontre avec Ian Manook autour des « Temps sauvages »

 

Pour aller plus loin

https://www.albin-michel.fr/ouvrages/mato-grosso

https://www.livredepoche.com/livre/mato-grosso


* Les 14 et 15 octobre 2017, à l’occasion de la seconde édition d’Auvers noir, le festival du roman noir d'Auvers-sur-Oise



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27/12/2020
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